Le fromage d’Auvergne perdu depuis longtemps : Le Mont de Courtesserre

Il y a dix ans, je me suis arrêté pour la nuit dans un petit hôtel, dans une petite ville du Mont-Dore, en Auvergne, en route vers les Alpes. Après mon long trajet, je voulais juste un repas et ensuite me coucher. La nourriture était correcte, le serveur âgé était attentionné. En débarrassant mon assiette, il m’a demandé si je voulais du fromage. Je ne souffre pas de « rêves de fromage », alors j’ai dit « oui », sans savoir que ce souvenir me hanterait pendant la décennie suivante.

Un fromage perdu depuis longtemps

Il apporta une sélection. Au centre se trouvait un petit volcan, dont la belle croûte pâle était recouverte d’une fine couche de cendres. Quelle merveille ! (…mais peut-être pas, car l’Auvergne est parsemée de volcans endormis).

Intrigué, j’en coupai une part. Une éruption de plaisir emplit ma bouche. Je souris. Le serveur sourit : « Oh oui, j’aime beaucoup ça. Intensément crémeux, légèrement piquant. » Je fermai les yeux en extase tandis que la saveur me captivait. Finalement, je demandai le nom et l’oubliai rapidement. C’était une GROSSE ERREUR, qui allait me hanter pendant les dix années suivantes. Si seulement je l’avais écrit. Si seulement ma mémoire n’était pas comme un sac en plastique perforé. Si seulement…

Mais pour l’instant, je me suis couché heureux, savourant l’arrière-goût de ma petite part de délice. D’une manière ou d’une autre, pendant mon sommeil, le souvenir volcanique s’est gravé dans mon subconscient, pour refaire surface par intermittence et m’inquiéter comme l’équivalent d’un fragment de chanson.

Je savais que j’adorais ce fromage et j’en voulais plus. Mais comment l’obtenir ? Comme je me levais tôt, je n’avais aucune chance de me renseigner en ville. Le temps passait.

Je regardais avec nostalgie, espérant apercevoir mon amour perdu. J’ai parcouru Internet, toujours à la recherche de… Lors d’une visite à Paris, les recherches dans les meilleures fromageries n’ont donné lieu qu’à des haussements d’épaules.

Sur les traces d’un rêve de fromage

Neuf ans plus tard, je rencontre par hasard la charmante Corinne de l’Office du Tourisme d’Auvergne Rhône-Alpes, à Londres, et je lui raconte ma situation. « Laissez-moi faire. Quand je rentrerai à la maison, je me renseignerai », me dit-elle.

Deux semaines plus tard, cet e-mail est arrivé

Trois mois plus tard, je me retrouvais en route pour Clermont-Ferrand et un rendez-vous avec mon destin fromager. J’ai réservé un déjeuner à La Fromagerie Nivesse où Corinne avait repéré mon fromage. Je me suis dépêchée de dépasser la file de clients affamés pour regarder les immenses comptoirs de fromages, essayant de la repérer. Je me sentais dépassée par les dizaines et dizaines de produits, mais là, dans un coin, se trouvait mon « Fromage d’amour perdu depuis longtemps ». Il n’y avait aucun doute sur l’angle doux, la croûte pâle et délicate, soulignée par des poussières de cendre plus foncées, et la peau crémeuse.

Maintenant, il fallait goûter ! Devant nous se trouvait une assiette de fruits, de pain et une sélection de six fromages locaux. Je n’avais d’yeux que pour un seul. J’en ai délicatement glissé une tranche sur un morceau de pain et, oh ! La première éruption de plaisir à la face crémeuse m’a submergée. Puis la sensation veloutée de la croûte saupoudrée d’une morsure complexe de cendre a suivi. Tout ce dont je me souvenais m’est revenu à la mémoire. Une gorgée de vin, puis une autre tranche. L’émotion du moment que j’avais attendu dix longues années m’a submergée. Je l’ai savouré pleinement.

Le fromage sans nom

J’ai décidé d’aller trouver le fermier qui fabrique ce fromage incroyable à La Côte Courtesserre. A quarante minutes à l’est de Clermont, le GPS m’a amené dans les environs, mais je n’ai pas réussi à le trouver. J’ai donc fait preuve de bon sens et j’ai exploré chaque chemin, chaque piste, chaque chemin de traverse, jusqu’à ce que je repère finalement un champ avec un troupeau de chèvres. Ce doit être ça ! Effectivement, un panneau peint à la main annonçait

Jean-Baptiste, le fermier, me regarda par la fenêtre de sa petite laiterie quand je m’arrêtai. J’avais trente-cinq ans et je souriais. J’avais interrompu sa fabrication de fromage. Il m’expliqua qu’il avait repris la ferme de ses parents il y a quelques années et qu’il possédait environ cent vingt chèvres et quelques boucs. Hors de vue, il y avait un petit troupeau de vaches. C’était un endroit idyllique, au sommet d’une colline douce, avec la chaîne des Puys en toile de fond. Ce n’était clairement pas un hasard si mon fromage imitait la forme et l’angle exact de la pente de ces géants. J’ai demandé à Jean-Baptiste comment s’était passée sa journée. « Je me lève à six heures et demie et je trais les chèvres et les vaches », sourit-il. « Tout seul ? » lui ai-je demandé. « Juste moi. Je le fais par amour. Par passion. Chaque jour. Mes dernières vacances remontent à trois ans. Ensuite, je vais au marché ou j’apporte mes fromages dans des magasins comme Back in the Afternoon pour en faire d’autres, environ soixante par semaine ». Il produit quatre fromages de chèvre, deux de vache et un de type mixte. Le mien n’avait pas vraiment de nom, explique-t-il, « les clients donnent leur propre nom ».

Nous avons traversé la piste, franchi une clôture électrique et il a appelé ses chèvres. Elles sont descendues du sommet de la colline pour nous encercler, un groupe joyeux, caressant, curieux, au pelage lisse et heureux. J’avais atteint la source pure de mon beau fromage, un fermier satisfait, avec ses animaux satisfaits.

Informations pratiques

www.auvergnerhonealpes-tourisme.com; www.atout-france.fr

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