Un océan gigantesque à 700 km sous la Terre : la découverte stupéfiante des scientifiques de l’Université Northwestern

Un réservoir d’eau insoupçonné

Des chercheurs ont mis en évidence un réservoir colossal d’« eau » à près de 700 km de profondeur, tapi dans la transition entre manteau supérieur et inférieur. Il ne s’agit pas d’un océan libre, mais d’eau piégée dans la structure de minéraux, en particulier la ringwoodite, formant une véritable « éponge » planétaire.

Ce gisement pourrait contenir un volume d’eau équivalant à plusieurs fois celui de tous les océans de surface. Cette découverte bouleverse notre vision du cycle de l’eau et interroge l’origine des mers terrestres.

La ringwoodite, clé du mystère

La ringwoodite est un minéral bleu, stable à très haute pression, capable d’incorporer des molécules d’H2O dans son réseau cristallin. Dans ces conditions extrêmes, l’eau est stockée sous forme d’hydroxyles, non pas en poches liquides, mais comme une part intime du cristal.

Des inclusions de ringwoodite trouvées dans des diamants profonds avaient déjà laissé entrevoir cette possibilité. Les nouvelles analyses confirment une abondance d’eau dans la zone de transition, au cœur de l’architecture interne de la Terre.

Une écoute sismique du manteau

Pour sonder ces profondeurs, les scientifiques ont exploité un réseau d’environ 2 000 sismographes et plus de 500 séismes. Les ondes se propagent différemment dans une roche humide que dans une roche sèche, modifiant leur vitesse et leur atténuation.

Ces signatures permettent de dresser une carte de l’hydratation du manteau, comme une échographie géante du globe. Les résultats convergent vers un réservoir vaste et diffus, invisible mais scientifiquement tangible.

« Nous avons observé des vitesses d’ondes compatibles avec une roche subtilement hydratée, en quantité suffisante pour constituer un réservoir planétaire », explique le géophysicien Steven Jacobsen. « Ce n’est pas un océan de surface, mais une mer minérale, essentielle au fonctionnement de la Terre. »

Image du phénomène

Un cycle de l’eau réinventé

La présence d’eau à grande profondeur éclaire un cycle de l’eau interne, couplé au cycle de surface. Les plaques en subduction entraînent des sédiments hydratés et des minéraux porteurs d’eau vers le manteau, où l’hydrogène se fixe.

À l’inverse, le volcanisme et les panaches chauds peuvent relibérer de l’eau vers l’atmosphère, stabilisant les océans sur des millions d’années. Cette « pompe » interne pourrait expliquer la relative constance du niveau marin à l’échelle géologique.

Implications majeures

  • Stabilisation possible des mers, malgré des épisodes extrêmes de tectonique et de volcanisme.
  • Rôle de l’eau dans la lubrification des zones de subduction et des failles profondes.
  • Influence sur la viscosité du manteau, donc sur la convection et la dérive des continents.
  • Nouvelles contraintes sur l’habitabilité planétaire et l’évolution du climat à long terme.

De l’hypothèse à la preuve

Des expériences en laboratoire, menées à très haute pression et température, reproduisent les conditions de la transition mantellique. Elles confirment la capacité de la ringwoodite à piéger des quantités significatives d’eau.

Les données sismiques, croisées avec la minéralogie, dessinent une image cohérente d’un manteau profond plus humide que prévu. Cette convergence renforce la robustesse de l’interprétation et ouvre une nouvelle ère d’observations.

Une planète qui respire par l’intérieur

Si l’eau modifie la viscosité des roches, elle influence la vitesse des courants mantelliques et la chaleur transportée vers la surface. Un manteau légèrement hydraté devient plus « ductile », facilitant la circulation de la matière.

Ce mécanisme pourrait expliquer certaines anomalies sismiques et la distribution des volcans. Il suggère une planète où l’eau régule silencieusement la machine géodynamique.

Questions encore ouvertes

Quelle est la répartition exacte de ce réservoir à l’échelle globale ? Varie-t-il selon les zones tectoniques, ou forme-t-il un système continu mais hétérogène ?

Des réseaux sismiques plus denses, couplés à l’imagerie tomographique 3D, permettront d’affiner cette carte. Des carottages de diamants profonds et des expériences in situ compléteront l’arsenal d’indices.

Une boussole pour l’astrogéologie

Comprendre ce stockage d’eau éclaire l’évolution des planètes rocheuses, de Vénus aux super-Terres. La présence d’une « éponge » minérale pourrait conditionner la tectonique et, in fine, l’habitabilité à long terme.

Cette découverte offre un cadre pour interpréter les signaux sismiques d’autres mondes, lorsque des instruments de nouvelle génération les rendront accessibles.

Entre science et imaginaire

La réalité dépasse la fiction: sous nos pieds, une mer minérale veille à l’équilibre de la Terre. Invisible aux yeux, elle fait pourtant battre le cœur de notre planète.

En révélant ce réservoir profond, la science nous rappelle que les grandes surprises se nichent souvent dans l’ombre des profondeurs. L’océan le plus vaste est peut-être celui que nous ne voyons pas.