« Il y a toujours quelque chose d’absent qui me tourmente. » Camille Claudel, lettre à Rodin, 1886
Être muse n’est pas aussi simple qu’il y paraît. Avec l’ouverture du premier musée national français consacré au talent de l’assistante et maîtresse de Rodin, Camille Claudel (1864-1943) a enfin reçu la reconnaissance qu’elle méritait depuis longtemps.
Musée dédié à l’œuvre et à l’époque de Camille Claudel
Grâce au musée, la petite ville de Nogent-sur-Seine, dans le sud-est de la France, à seulement une heure et demie de route de Paris (et à moins d’une heure en train partant quotidiennement de la gare de l’Est) et où Camille a passé trois ans de sa vie avec sa famille, est sur le point de rejoindre d’autres destinations « Excursions d’une journée depuis Paris » centrées sur les artistes, telles que Giverny de Monet et Auvers-sur-Oise de Van Gogh.
On ne pense pas à Camille Claudel sans la lier inextricablement à Auguste Rodin. Les deux hommes se sont rencontrés lorsque Rodin avait accepté de superviser un cours du sculpteur Alfred Boucher (bien représenté au musée), professeur de Claudel, en son absence. On raconte que le professeur est tombé amoureux de son élève de 18 ans presque instantanément. Leur liaison passionnée a duré dix années mouvementées, Camille finissant les trente dernières années de sa vie confinée dans un asile psychiatrique par son jeune frère Paul et son médecin.
Pour replacer le travail de Claudel dans son contexte, une bonne partie du musée est consacrée aux enseignants, influenceurs et artistes qui ont marqué sa vie. Les œuvres d’autres assistants de Rodin, tels que Jules Desbois (1851-1935), François Pompon (1855-1933) et Antoine Bourdelle, montrent comment, comme Camille Claudel, ils ont peut-être commencé par imiter Rodin, mais ont ensuite trouvé leur propre style personnel. .
L’œuvre de Rodin est abordée sous l’angle des grandes commandes sur lesquelles Camille Claudel a travaillé comme assistante ou pour lesquelles Rodin l’a consultée, telles que « La Porte de l’Enfer », « Les Bourgeois de Calais » ou encore son « Monument à Balzac ». À travers une série de photographies, on peut suivre l’évolution de ces œuvres, dont certaines ont été personnellement commandées par Rodin pour être exposées aux côtés de ses sculptures.
L’une des premières sculptures de Claudel, « Femme accroupie » (1884-85), s’inspire d’une œuvre sur le même sujet de Rodin (1881-1882). Comparer « Printemps éternel » et « L’idole éternelle » de Rodin, et « Sakountala » et « Abandon », tous deux de Claudel, montre une inspiration partagée mais des émotions différentes.
En 2003, Nogent-sur-Seine accueille une exposition consacrée à Camille Claudel. Le succès est tel que les autorités municipales décident d’agrandir le musée Dubois-Boucher et de créer un musée dédié à Camille Claudel. Le projet prend de l’ampleur en 2008 lorsque la ville réalise trois acquisitions majeures : la Maison Claudel, autour de laquelle sera construit le nouveau musée ; « Persée et la Gorgone », la seule œuvre en marbre de Claudel achetée grâce à un financement patrimonial et un parrainage commercial ; et l’importante collection privée d’œuvres de Camille Claudel acquise auprès de Reine-Marie Paris et Philippe Cressent.
Détentrice de la plus grande collection au monde d’œuvres de l’artiste, la collection Camille Claudel n’a cessé de s’enrichir au fur et à mesure des mises sur le marché.
Camille Claudel, une héroïne dramatique
Aujourd’hui, Camille Claudel est considérée comme une héroïne dramatique symbolisant la place de la femme à la fin du XIXe et au début du XXe siècle. Mais elle est surtout une artiste majeure au niveau mondial, qui a établi des liens entre le naturalisme et le symbolisme, le mouvement néo-florentin et l’Art nouveau. La collection comprend sa première œuvre, « La Vieille Hélène », présentée au Salon des Artistes Français en 1882, jusqu’à ses derniers bronzes reproduits par Eugène Blot en 1905.
Aussi polyvalente et talentueuse que soit Claudel, son héritage sera à jamais éclipsé par Rodin. A noter que l’ouverture du musée de Camille Claudel coïncide cette année avec le 100e anniversaire de la mort de Rodin, marqué par une exposition au Grand Palais de Paris qui se termine le 31 juillet.
Malheureusement, Camille a détruit une grande partie de ses œuvres d’art – sculptures, dessins et croquis – dont seulement quatre-vingt-dix environ ont survécu. Le musée Camille Claudel, dont l’ouverture est prévue le 26 mars 2017, présentera environ la moitié de ces œuvres.
Musée Camille Claudel, 10 Rue Gustave Flaubert, 10400 Nogent-sur-Seine www.museecamilleclaudel.fr
Train Paris : Départ Gare de L’Est vers Nogent-sur-Seine (10 minutes à pied de la gare)
A noter : Si vous conduisez, Nogent-sur-Seine est sur la route de la magnifique ville médiévale de Troyes, porte d’entrée de la Champagne.
Barbara Pasquet James est une rédactrice lifestyle, conférencière et exploratrice urbaine américaine qui écrit sur la cuisine, la mode et la culture, depuis Paris. Elle est connue pour avoir participé au lancement, à la rédaction et à la révision du City Guide To Paris d’USA Today et peut être contactée via son blog photo focusonparis.com